Aussi qualifié d’ivresse du sommeil, ou de syndrome d’Elpénor, l’éveil confusionnel est un trouble du sommeil gênant, mais n’ayant pas ou peu d’incidence sur la santé du dormeur. À quel moment de la nuit se déclenche ce trouble ? Comment le gérer si vous-même, ou si votre enfant y êtes sujet ? On va répondre à ces différentes interrogations dans ce contenu.
Éveil confusionnel : c’est quoi l’ivresse du sommeil?
L’éveil confusionnel fait partie des troubles du sommeil, et plus précisément des parasomnies. Ci-dessous, nous en résumons ses symptômes, ses principales causes, et revenons sur les anecdotes historiques ayant éclairé ce syndrome.
Symptômes classiques de l’éveil confusionnel
Comme l’expression le sous-entend, l’éveil confusionnel est caractérisé par un état de confusion chez celui qui vient de se réveiller. Dans les formes cliniques sévères, ce sentiment de confusion peut prendre la forme d’un comportement incohérent et spectaculaire : démonstrations de violences, chutes, discours insensés … C’est pour cette raison que l’éveil confusionnel est aussi appelé « ivresse du sommeil ».
Cette sensation de confusion dure généralement de 5 à 15 minutes. Toutefois, dans certains cas, ces épisodes peuvent durer plus d’une heure. Une fois revenue à la conscience, la personne ne se souvient plus de son état : elle est comme amnésique.
Éveil confusionnel : quelles en sont les causes?
En général, les éveils confusionnels se produisent au début de la nuit ou après une sieste. Ils sont presque toujours induits par un réveil provoqué (le dormeur est donc tiré de son sommeil par un stimulus externe). Les dormeurs les plus sujets aux éveils confusionnels sont de loin les enfants, dont 15% environ peuvent y être sujets un jour ou l’autre.
Plutôt considéré comme normal chez ces derniers, l’éveil confusionnel pourrait toutefois résulter d’un stress intense et mal géré. Chez l’adulte, l’éveil confusionnel est plus rare et souvent (quoique pas toujours) associé à une consommation de médicaments ou autres stupéfiants. Selon une étude publiée en 2014 dans la revue Neurology, les gros dormeurs et les petits dormeurs seraient aussi des populations plus concernées que les autres.
Quelque cas d’ivresse de sommeil ayant marqué l’Histoire
Pour l’anecdote, le syndrome d’éveil confusionnel est également appelé syndrome d’Elpénor. Ce nom découle d’un mythe grec. Elpénor, compagnon de route d’Ulysse, se serait réveillé brusquement d’une sieste près du temple de Circé. Ayant mal retrouvé ses esprits, il serait alors tombé de la terrasse où il était installé, se tuant sur le coup.
Dans l’histoire moderne, le syndrome d’Elpénor refait parler de lui en 1920, à cause de la mésaventure du président Deschanel. Président de la République française à l’époque, il est pris d’une ivresse de sommeil pendant un voyage en train. En proie à la confusion, il descend alors de ce dernier … qui est toujours en marche. Fort heureusement, il ne s’en tirera qu’avec de légères blessures.
Quelles sont les autres grandes parasomnies sans REM dont l’éveil confusionnel fait partie ?
On appelle « parasomnies » les troubles du sommeil qui surviennent lorsqu’on dort. Les parasomnies sont donc à opposer aux troubles comme l’insomnie ou comme la narcolepsie. Par ailleurs, on distingue deux catégories de parasomnies différentes : les parasomnies ayant lieu au cours du sommeil profond (sans REM), et les parasomnies du sommeil paradoxal.
Les parasomnies qui ont cours durant le sommeil paradoxal sont plutôt banales, et surviennent chez tout le monde tout au long de la vie : ce sont les cauchemars et l’agitation nocturne. En revanche, les parasomnies du sommeil profond sont plus rares, et plus problématiques. Parmi les plus connues, on trouve le somnambulisme, les terreurs nocturnes, et l’énurésie nocturne.
Les terreurs nocturnes
La terreur nocturne est un trouble qui concerne en particulier les enfants, surtout en bas âge. Chez les moins de 6 ans, la prévalence serait d’environ 6%, alors qu’elle tombe à 1% chez l’adulte1
Le dormeur en proie à une terreur nocturne commence le plus souvent par se redresser dans son lit. Ses yeux sont écarquillés et si l’on se penche, on peut observer une dilatation anormale de ses pupilles. Ses traits sont quant à eux tirés, comme s’il voyait quelque chose d’effrayant. Plusieurs manifestations de panique peuvent alors se produire : sudation excessive, hurlements avec propos incohérents, pleurs, agitation …
Les terreurs nocturnes ne peuvent donc pas être confondues avec les simples cauchemars. Elles induisent en effet des réactions spectaculaires : le dormeur est assis, les yeux ouverts, mais inconscient. Lorsque c’est un enfant qui est en proie à une telle frayeur, il ne pourra en général pas être calmé par ses parents. Un tel épisode de terreur peut durer jusqu’à 20 minutes, après quoi le dormeur se rendort spontanément. Il n’aura aucun souvenir de sa crise ni de l’objet de sa terreur au réveil.
Le somnambulisme
Le somnambulisme est une parasomnie fréquente chez l’enfant. Ainsi, 20% des 4 à 8 ans seraient concernés2. Les dormeurs somnambules sont aussi souvent atteints d’énurésie nocturne et de terreurs nocturnes. Avec l’âge, la prévalence de ces troubles tend à diminuer. De fait, les adultes sont bien moins touchés que les plus jeunes.
Une personne somnambule est un dormeur qui se déplace lors de son sommeil, en pleine inconscience de ses mouvements. Différents niveaux de sévérité ont été constatés. À un niveau léger, le somnambule se redresse dans son lit. Il peut alors tenir un monologue ou faire des mouvements de bras incohérents.
Toutefois, dans des cas plus sévères, le somnambule peut se promener dans la maison, réveiller sa famille, ouvrir le réfrigérateur et manger, voire faire le ménage … Il a même été rapporté le cas d’une femme qui envoyait des emails pendant ses épisodes de somnambulisme !3
Presque toujours, la personne somnambule finit par se recoucher spontanément. Au réveil, il ne se souvient pas, ou que peu de son comportement durant la nuit. Pour l’entourage, ce syndrome est spectaculaire, quoique rarement dangereux. L’épisode de somnambulisme se reconnaît surtout à l’absence totale d’expression lisible sur le visage du dormeur. On ne peut jamais y discerner ni joie, ni peur, ni espièglerie, ni colère …
L’énurésie nocturne
L’énurésie nocturne concerne environ 20% des enfants à 5 ans, et 3 à 4% des enfants à 10 ans. Certains adultes sont aussi concernés, quoique la prévalence soit plus réduite. Les énurétiques, durant leur sommeil profond, vident le contenu de leur vessie sans en avoir conscience. Ce syndrome peut induire un grave mal-être par le sentiment de honte suscité. Ses causes sont toujours mal comprises, quoique la recherche croie en l’importance des facteurs d’ordre psychoaffectifs.
Les traitements pour contrer l’éveil confusionnel
Tout d’abord, il faut rappeler que l’éveil confusionnel est en général consécutif à un réveil brutal. Le meilleur moyen de l’éviter est de dormir dans un endroit calme, et d’être organisé de sorte à pouvoir se réveiller naturellement le matin.
L’éveil confusionnel n’est pas un syndrome grave ni dangereux. Les accidents qui y sont relatifs sont en fait très rares. Concernant en majorité les enfants, ce trouble du sommeil disparaît presque toujours spontanément en grandissant.
Néanmoins, si les ivresses du sommeil sont mal vécues, et surtout si elles sont associées à d’autres troubles du sommeil, elles peuvent être un signe de mal-être psychique. Consulter un psychologue peut alors s’avérer utile.
Chez l’adulte, l’éveil confusionnel est plus rare, mais plus persistant. Sur conseil de son médecin, il sera parfois utile de procéder à une polysomnographie pour mieux en comprendre les causes. L’éveil confusionnel, par ailleurs, est souvent à l’âge adulte une conséquence secondaire d’un traitement médicamenteux. Pour le soigner, on peut changer le traitement mis en cause, ou sinon prescrire des antidépresseurs.
FAQ – L’éveil confusionnel
Des études menées au début des années 2000 en Angleterre en Italie concluent à une prévalence de 4% parmi la population générale4. Les enfants de 3 à 13 ans seraient de loin les plus concernés, 17,3% d’entre eux pouvant souffrir d’éveil confusionnel
On qualifie de parasomnie tout trouble du sommeil qui se manifeste pendant, ou après l’endormissement. Cette définition exclut notamment de son champ les insomnies. Certaines parasomnies sont normales, voire fréquentes. C’est notamment le cas des cauchemars ou de l’agitation nocturne.
En revanche, d’autres parasomnies peuvent s’avérer plus handicapantes. Nous avons listé les principaux plus haut dans ce contenu : éveil confusionnel, somnambulisme, etc.
L’éveil confusionnel se manifeste toujours au réveil. En général, il survient lorsque le dormeur est brusquement tiré d’une phase de sommeil profond. Cela suppose qu’il ait été réveillé par quelqu’un ou par son réveil, une alarme, un bruit, etc.
Sources :
- Michel Billiard et Yves Dauvilliers, Les troubles du sommeil, Paris, Masson, 2005, p. 191
- Lavie, Peretz, Atul Malhotra et Giora Pillar, Sleep Disorders. Diagnosis, Management and Treatment. A Handbook for Clinicians, Londres, Martin Dunitz, 2002, p. 146–147.
- Lavie, Peretz, Atul Malhotra et Giora Pillar, Sleep Disorders. Diagnosis, Management and Treatment. A Handbook for Clinicians, Londres, Martin Dunitz, 2002, p. 146–147.
- Mahowald, Mark W.; Schenck, Carlos H. (October 2005). « Insights from studying human sleep disorders ». Nature. 437 (7063): 1279–1285. Bibcode:2005Natur.437.1279M. doi:10.1038/nature04287. ISSN 0028-0836. PMID 16251953.
- Lettieri, Christine F.; Hathaway, Nathanael E.; Carter, Kevin A. (2014-03-01). « Common Sleep Disorders in Children ». American Family Physician. 89 (5): 368–377. ISSN 0002-838X.