Le 2 octobre dernier, une fillette de 10 ans a chuté d’environ 8 mètres du 3e étage d'un immeuble de Villefranche-sur-Saône. La cause : son somnambulisme. Le somnambulisme toucherait 2% des adultes en France en France. Nous avons tous en tête l’image du somnambule calme et doux, parcourant les pièces de la maison les bras tendus, et dans le silence durant une partie de la nuit. Stéréotype ou réalité : en quoi consiste vraiment le somnambulisme ? D’où vient-il ? Se soigne-t-il ? Comment réagir face à un somnambule ? Le somnambulisme est-il dangereux ? Quelles précautions à prendre avec un somnambule ?

I/ Qu’est-ce-que le somnambulisme ?

Le somnambulisme est un état entre l’éveil et le sommeil. Il conjugue des caractéristiques propres à l’éveil, c’est-à-dire, l’activité des membres responsables du mouvement du corps, et des caractéristiques propres au sommeil, c’est-à-dire, l’inactivité de la conscience. En clair, les somnambules exercent des mouvements et accomplissent des actes, mais ils n’ont pas conscience de ce qu’ils font.

dossier somnambulisme sommeil

Les actes des somnambules sont plus ou moins automatisés, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent pas réaliser d’activités complexes, qui nécessitent de la réflexion : par exemple, ils ne peuvent pas lire, ou retrouver un objet perdu, puisqu’ils ne sont pas en pleine conscience que cet objet est perdu, et ils n’ont pas l’aptitude, à ce moment-là de leur activité, de procéder à une recherche selon des souvenirs ou des indices.

D’ailleurs, après un épisode de somnambulisme, le somnambule ne se rappelle jamais de ce qui s’est déroulé.

Quand se produisent les épisodes de somnambulisme ? 

Les épisodes de somnambulisme se produisent durant la phase de sommeil profond. Notre sommeil comprend 4 à 6 cycles par nuit. Chaque cycle dure environ 90 minutes et se décompose en 3 types de sommeil : le sommeil lent léger, le sommeil lent profond (celui pendant lequel on récupère), et le sommeil paradoxal (celui pendant lequel on rêve). 

Les types de sommeil évoluent selon l’avancement de la nuit, et le sommeil profond est plus présent jusqu’à 3-4 heures du matin. C’est durant ces phases de sommeil profond que peuvent survenir des crises de somnambulisme. Celles-ci durent entre 20 et 40 minutes.

À quoi ressemble une crise de somnambulisme ? 

Une crise de somnambulisme peut prendre de nombreuses formes, très variées. Un somnambule n’est pas forcé de se lever et de déambuler dans la maison. Il peut également seulement s’asseoir sur son lit, puis se recoucher. Néanmoins, il peut également aller se préparer un en-cas en cuisine !

II/ Quelles sont les causes du somnambulisme ?

Le somnambulisme touche davantage d’enfants que d’adultes : 10 à 15% des 8-12 ans, contre environ 2% des adultes. Les causes du somnambulisme n’ont pas encore été déterminées par les spécialistes, et celles-ci semblent demeurer un mystère. Toutefois, la revue internationale Sleep  dédiée au sommeil estime que 59% des cas de somnambulisme chez les adultes sont couplés à d’autres symptômes comme la dépression, les migraines, ou encore le manque de sommeil

Aussi, le somnambulisme apparaîtrait peut-être après un épisode traumatique ou en période de stress intense. Selon le Docteur Petiau, neurologue strasbourgeois spécialisé dans les problématiques du sommeil : «Les situations qui fragmentent le sommeil favorisent la survenue d'épisodes de déambulations chez les personnes prédisposées. Réveiller quelqu'un qui est en phase de sommeil profond peut aussi déclencher un éveil confusionnel, un état proche du somnambulisme ».

Mais, ce qui est relativement certain, c’est que le somnambulisme relève de dispositions génétiques. En effet, 80% de patients atteints de ce trouble auraient au moins l’un de ses deux parents également atteint.

III/ Quelles sont les conséquences du somnambulisme ?

La première des conséquences du somnambulisme est la fatigue induite par ces nuits marginales. En effet, le somnambule dort moins bien que les dormeurs lambda, étant donné que ses nuits sont agitées.

Il en découle une fatigue chronique, et quelques endormissements, parfois en journée, ce qui mène à des problèmes au quotidien, et à une mauvaise humeur, voire une dépression. Effectivement, la dépression est souvent relevée chez les individus somnambules. Cause ou effet du somnambulisme ? Les deux sont possibles, toujours est-il que les deux facteurs sont étroitement liés.

Mise à part cette fatigue chronique, et cette potentielle complémentarité avec la dépression, le somnambulisme n’entraîne pas réellement de conséquences dans la mesure où 90% des somnambules ne se souviennent pas de ce qu’ils ont fait durant la nuit. En général, ce sont leurs conjoints ou leurs proches qui le leur indiquent, et les intéressés ne ressentent rien d’autre qu’une légère désorientation.

En revanche, le somnambulisme peut également conduire à des actes dangereux, étant donné que le somnambule n’a pas véritablement conscience ce de ce qu’il est en train de faire.

IV/ Quels sont les risques du somnambulisme ? cas particuliers et connus

Le Figaro Santé raconte qu’un homme est devenu tétraplégique après avoir fait une chute dans les escaliers, ou qu’une jeune femme a du se faire amputer après avoir pris sa voiture en plein sommeil et avoir embouti un arbre.

Autant de scénarios qui font froid dans le dos. Le magazine interroge également une trentenaire atteinte de somnambulisme : «Je ne sais pas de quoi je suis capable dans mon sommeil. Est-ce que je ne risque pas de prendre ma voiture, de me blesser ou, pire encore, de blesser quelqu’un? ». Un autre complète : « Alors comment être certain qu'il ne m'arrivera pas un jour la même chose? Ne rien contrôler, c'est ce qu'il y a de pire».

En effet, l’équipe du professeur Yves Dauvilliers, spécialiste du sommeil à l’hôpital Gui-de-Chauliac à Montpellier, après une étude menée sur 100 patients, est arrivée au résultat que 58% d’entre eux avaient fait preuve de violence au moins une fois durant leurs crises de somnambulisme. 17% des cas relevaient d’une atteinte physique au patient lui-même, ou à son partenaire de chambre; l’un des patients s’étant même défenestré du 3e étage...

personnes somnambule

Donc effectivement, le somnambulisme peut avoir des conséquences et être dangereux pour le dormeur somnambule et pour ses proches, en tant que le patient n’a pas nécessairement de mauvaises intentions, puisqu’à vrai dire, durant ses crises, il n’a même véritablement aucune intention, en tant qu’il n’est pas conscient à proprement parler.

Et justement, ce manque de conscience de ses actes devient dangereux pour lui-même et pour les autres, puisqu’il ne relève pas la dangerosité de ses actions. Aussi, il convient de prendre quelques précautions avec un dormeur somnambule.

V/ Quelles précautions faut-il prendre avec un somnambule ?

La première de toutes, même si elle n’est pas évidente à mettre en oeuvre, est d’être attentif aux bruits et à la présence du dormeur somnambule dans son lit. Au moindre signe d’incartade, il importe de s’enquérir de ce qu’est en train de faire le somnambule, et de s’assurer qu’il n’entreprend rien de dangereux.

Lorsque l’on vit avec un somnambule, il est également important  de veiller à bien fermer les issues de la maison ou de l’appartement, c’est-à-dire, les fenêtres et les portes. On peut également penser à installer une sécurité sur les fenêtres situées aux étages, afin d’éliminer tout risque de défenestration. Il existe des poignées intégrant une serrure à clef, et d’autres consistant en des sécurités enfant. Attention, même si le dormeur noctambule n’a pas véritablement confiance de ce qu’il fait, il sera sans doute à même de déjouer les systèmes de sécurité les plus simplistes.

Comme lorsque l’on vit avec des enfants, il peut être de bonne augure de cacher les objets coupants et pointus, ainsi que les produits chimiques dangereux pour la santé.

Pour les enfants somnambules, il est préférable de les faire dormir dans un lit au sol, et non dans un lit superposé.

D’ailleurs, le somnambulisme est un motif de réformation du service militaire, en tant que ce dernier implique de dormir entouré d’armes.

VI/ Comment réagir avec un somnambule ?

Contrairement à la croyance commune, il n’arrivera rien à un somnambule que l’on réveille. Le réveil d’un somnambule en pleine crise est sans gravité. Toutefois, le dormeur risque d’être désorienté, et il est préférable, pour ne pas trop stresser son sommeil ni son réveil, de le reconduire vers son lit en douceur, sans le choquer ou le brusquer.

Comme lorsque quelqu’un fait un cauchemar, on ne le réveille pas en sursaut, mais doucement et tranquillement, de manière à ne pas provoquer davantage de tension qu’il n’en ressent déjà. Les crises de somnambulisme violentes sont rares, et dans ce cas précis, si la personne amenée à réveillée le dormeur s’aperçoit que son réveil pourrait induire une potentielle violence, il convient alors de prendre d’autant plus de précautions, et de l’éveiller en douceur.

Les parents d’enfants somnambules peuvent essayer de réveiller ces derniers une vingtaine de minutes avant l’heure habituelle où surviennent les crises, de manière à les éviter, tout simplement en laissant l’enfant se rendormir après un véritable réveil, qui lui aura coupé son cycle. Le but : ne pas atteindre le cycle du sommeil profond. Cette technique éradiquerait les crises de somnambulisme au fur et à mesure.

V/ Comment traiter le somnambulisme ?

Le somnambulisme se produit durant une période de sommeil censée être très récupératrice  pour l’organisme (même si dans les faits, le somnambule récupère mal); or les périodes de sommeil récupératrices se produisent en général dans plusieurs cas :

  • un état de fatigue général
  • un état de stress général
  • des horaires de lever et de coucher irréguliers générant des besoins de récupération
  • la consommation d’alcool
  • le temps passé devant les écrans
    ....

En bref, le but est de ne plus avoir besoin de ces phases de sommeil récupératrices, et donc, de modifier son hygiène de vie afin d’être en forme et bien reposé. Cela passe par de petits détails comme le fait de ne pas s’endormir devant un écran, de ne pas consommer d’alcool quelques heures avant le coucher, ou de se coucher et de se lever à heures fixes.

L’hypnose constitue souvent un moyen efficace pour enrayer les crises de somnambulisme. C’est une méthode rapide qui traite le problème en profondeur sans forcer le dormeur somnambule à avoir recours à des solutions médicamenteuses.

Les somnambulismes d’origine psychologique peuvent également se trouver enrayées par la consultation d’un psychologue, aussi, une thérapie peut, en dévoilant le problème enfoui sous les crises de somnambulisme, faire cesser ces dernières.

Enfin, après avoir essayé diverses méthodes, et si celles-ci ne fonctionnent pas, un médecin peut prescrire des benzodiazépines : c’est ce que l’on retrouve dans les anxiolytiques. Ce sont en fait des tranquillisants qui réduisent les phases de sommeil profond, et diminuent par la même occasion les chances qu’une crise survienne.

Certains dormeurs somnambules réservent leurs prises médicamenteuses lorsqu’ils dorment à l’extérieur de chez eux, et que le risque de crise est augmenté, comme lorsqu’ils sont hébergés chez des amis par exemple. Il s’agit dans ce cas précis davantage d’un acte préventif que d’un acte curatif.

VIII/ Le somnambulisme : un trouble du sommeil parmi d’autres

Le somnambulisme fait partie de ce que l’on appelle les parasomnies. Il s’agit d’un groupement de troubles du sommeil comportant le somnambulisme, mais aussi les cauchemars, ou encore les terreurs nocturnes par exemple.

Il existe des parasomnies concernant le sommeil lent profond (celui pendant lequel apparaissent les crises de somnambulisme), mais également des parasomnies touchant le sommeil paradoxal, ou encore l’endormissement.

L’ensemble de ces troubles est déclenché par le stress, les maladies, la mauvaise hygiène de vie, ou la privation de sommeil, même si on retrouve bien souvent des liens familiaux à l’oeuvre : les enfants de parents atteints le sont en effet souvent également.